PARCOURS PHOTOGRAPHIQUE : DE LE GRAY À BRANCUSI

Jeudi 14 novembre 2013 - Drouot presse
Kapandji Morhange
L’ouverture de la 17e édition de Paris Photo sera l’occasion d’une importante vente de photographies anciennes et modernes, constituée de plusieurs collections. Le Second Empire et la période moderniste seront mis en lumière tant au travers de grands noms, tels Gustave LE GRAY, Érmé DÉSIRÉ, Constantin BRANCUSI, que des signatures plus confidentielles à redécouvrir, comme Alphonse DELAUNAY ou Aurel BAUH.

 

Le XIXe siècle

 

Parmi les grands noms de la photographie du XIXe siècle, cette sélection proposera des travaux de Gustave LE GRAY (1820-1884) : 3 marines de Normandie de 1858 et 18 rares vues du Camp de Châlons, circa 1857, réalisées dans l’atelier de l’artiste à partir de négatifs verre au collodion. Parmi la série consacrée au camp militaire, deux épreuves illustrent la grande maîtrise technique du photographe.

Manœuvres du 3 octobre / Cavalry maneuvers, October 3, camp de Châlons, 1857, par sa composition et ses tonalités exceptionnelles, est probablement l’une des œuvres les plus représentatives de la production de Gustave le Gray. On aperçoit une scène mystérieuse à forte puissance esthétique, encadrée par la large bande claire du ciel et celle très foncée de la terre.

Inauguré par Napoléon III en 1857, le camp d’instruction militaire de Châlons-sur-Marne revêtait une importance capitale dans la stratégie de défense de la France et constituait un symbole fort de l’esprit d’innovation et de grandeur du Second Empire. Gustave Le Gray fut le premier photographe à couvrir officiellement l’événement qui se déroula du 29 août au 10 octobre 1857. (8 000 / 12 000 €)

 

La composition parfaite de l’épreuve Le moulin à roue à aube, près du camp de Châlons, datée de 1857, met en scène neuf personnages disséminés dans la composition (barque, voiture, fenêtre, tombereaux) et promène notre regard avec amusement sur cette multiplicité de scènes. On retrouve ici tout l’art de la construction picturale, que Gustave Le Gray a étudié (25 000 / 30 000 €).

 

Ces deux épreuves, provenant d’une ancienne famille du Sud-Ouest, portent la signature « Gustave Le Gray » à l’encre rouge et portent la mention « Photographie Gustave Le Gray & Co Paris» sur le bristol de montage.

 

Deux albums réalisés par Ermé DÉSIRÉ (actif entre 1860 et 1880), immortalisent différents corps de l’armée khédiviale et dignitaires du régime égyptien entre 1867 et 1874.

Portraits de dignitaires du régime et corps de l’armée khédiviale, Le Caire, vers 1867-1874, est le titre donné à l’ensemble constitué de 47 épreuves d’époque sur papier albuminé présentées dans deux albums reliés.  25 d’entre elles sont rehaussées en couleurs et à l’or. La remarquable exécution du travail à l’aquarelle et à la gouache fait parfois disparaître la photographie d’origine ; c’est le cas pour 8 portraits équestres de dignitaires du régime. Les autres épreuves représentent les différents corps d’armée, la garde d’honneur du khédive, la musique de la garde. Il s’agit là d’une commande officielle car les sujets traités sont inhabituels pour l’artiste, Désiré étant plus connu pour ses portraits de personnages de rue.

Le carton de montage est signé à l’encre rouge « E. Désiré Phot. Caire », un cachet encré est appliqué sur la première planche, encadré de deux médaillons « Exp Univ » « Paris 1867 ». Sur la plupart des planches figure un timbre en relief « Photographie Parisienne / Royer & Aufiere / Désiré & Cie Successeurs / Caire Égypte ». (10 000 / 12 000 €)

 

Une importante collection de 250 négatifs verre au collodion et tirages originaux d’Alphonse DELAUNAY (1827-1906) sera ensuite dispersée en 26 lots.

 

Une fortune confortable, dont il hérite de son père, permet au rouennais Delaunay de s’adonner à la photographie et de réaliser de nombreux voyages. La redécouverte récente de ses albums d’Espagne révèle ses relations avec Gustave Le Gray, dont il utilise les techniques et qui effectue les tirages de ses clichés.

 

La sélection qui nous intéresse ici éclaire un aspect plus intime de sa pratique photographique, que l’artiste poursuivra des années 1860 à la fin du siècle. Son mariage lui ouvre les portes d’Honguemarre, propriété de la famille Chastellain, située dans l’Eure. Il y immortalise de nombreux paysages, vues du château, scènes de la vie quotidienne, natures mortes. Il excelle également dans les portraits, dont plusieurs inédits seront proposés.

 

Se présentant dans un album relié, le corpus Honguemarre, 1861-1862, se compose de 37 épreuves d’époque sur papier albuminé et 22 négatifs verre, certains agrémentés de légendes. (8 000 / 10 000 €)

La planche n° 26 restitue une partie de dames entre Alphonse Delaunay et sa belle-mère, tandis que la planche n° 33 présente la remarquable « installation photographique », véritable studio d’extérieur qui servira à la réalisation de très nombreux portraits de famille et d’amis.

 

L’album Souvenirs d’Artonne, propriété de Monsieur Adolphe Asseline s’inscrit dans la même veine et date de 1864 ; il regroupe 31 épreuves d’époque tirées sur papier albuminé et 2 négatifs verre au collodion. (3 000 / 4 000 €)

 

Complèteront cette première partie de vente des vues d’architecture par Édouard Denis BALDUS (1813-1889), Charles MARVILLE (1813-1879) et Joseph CUNDALL (1818-1895) ; des nus par Bruno BRAQUEHAIS (1823-1875), Auguste BELLOC (1800-1867), Félix-Jacques-Antoine MOULIN (1802-1875) ou Louis-Camille d’OLIVIER (1827-1870) ; des portraits par le lyonnais Jean-Baptiste FRENET (1814-1889), Charles NÈGRE (1820-1880), Félix NADAR (1820-1910), Thomas RODGER (1832-1883), dont des personnalités telle la Castiglione par Pierre-Louis PIERSON (1822-1913), Gustave Courbet, Camille Saint-Saëns, Buffalo Bill …

 

Le XXe siècle

 

Dans cette seconde partie, une visibilité particulière sera accordée aux artistes modernistes roumains tels que Constantin BRANCUSI (1876-1957), Harry BRAUNER (1908-1988), Benjamin FONDANE (1898-1944) et Aurel BAUH (1900-1964).

 

Le travail d’Aurel BAUH sera la redécouverte de cette section.

Élève d’Archipenko à Berlin et de Fernand Léger à Paris, il décide d’investir le champ photographique au contact de nombreux amis d’artistes.

Partageant sa carrière entre la France (1923-1935 et 1961-1964) et la Roumanie (1937-1961), le photographe a développé un style visuel proche de l’esthétique du Bauhaus, empreint de culture des pays de l’est et d’art moderne. Les collectionneurs pourront apprécier sa production à travers plus de 150 photographies : portraits, autoportraits, paysages urbains et scènes de la vie rurale, ainsi que par des projets publicitaires ou des carnets d’œuvres originales.

 

Ce corpus est le fruit de 20 ans de collection et a fait l’objet de plusieurs présentations au public ces dernières années : au

 

Kunsthal de Rotterdam en 2009 lors de l’exposition consacrée aux surréalistes roumains 1928-1947, ainsi  qu’au centre Georges Pompidou en 2012-2013 à l’occasion de l’exposition Voici-Paris, modernités photographiques 1920-1950 (ancienne collection Christian Bouqueret).

L’intérêt des acheteurs s’arrêtera particulièrement sur deux épreuves gélatino-argentiques d’époque, portant le cachet du photographe au dos « Photo Aurel Bauh Paris» : Vision (2), 1929-1930, (2 000 / 3 000 €) et Chaises (accumulation), 1929-1934 (1 200 / 1 500 €).

 

Compléteront la sélection :

de la documentation sur François KOLLAR (1904-1979), reconnu notamment pour sa série sur Les Français au travail publiée aux éditions Horizons de France en 1932 ;

des photographies officielles de Fatima Pahlavi et Tadj-ol-Molouk, respectivement épouse et mère du Shah Mohammed Réza Pahlavi, prises par le photographe officiel de la cour d’Iran, Sako BAKHT ;

16 épreuves argentiques sur le thème de la danse par Cyril ARAPOFF (1898-1976) ;

 

Le programme se clora par un bel ensemble de photographies par Jean-Philippe CHARBONNIER (1921-2004) et Jean-Loup SIEFF (né en 1933), réalisé en 1983 pour la campagne publicitaire de lancement de la Renault 25.

 

 

Vente aux enchères publiques – Hôtel Drouot :

Jeudi 14 novembre à 14h

 

Expositions publiques – Hôtel Drouot :

Mercredi 13 novembre de 11h à 18h

Jeudi 14 novembre de 11h à 12h



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