OVA - ORIGINE(S) • ÉCRITS DU MOYEN-ÂGE ET DE LA RENAISSANCE

samedi 16 juin 2018
Experts : Ariane Adeline, Thierry Bodin, Jacques Benelli
 
La série de ventes débutera par la vente Origine(s) • Écrits du Moyen-Âge et de la Renaissance, organisée par la maison Aguttes. Quarante-cinq chartes, manuscrits, incunables et imprimés du Moyen-Âge aux grandes découvertes de la Renaissance sont regroupés au sein de cette vente estimée 4,5 millions d’euros. Les chartes et documents proposés permettent de parcourir une partie de l’Histoire de France, d’août 825 avec la charte en faveur de l’abbaye de Corbie, à 1622 avec une lettre de Marie de MEDICIS (1575- 1642) adressée à sa tante. On y découvre une lettre de Jean II LE BON (1319-1364) à son fils lors de sa captivité en Angleterre, des lettres de Louis XII (1462-1515), de François Ier (1494-1547) et de sa soeur Marguerite D’ANGOULÊME, reine de Navarre (1492-1549), d’Henri II (1519-1559), d’Henri IV (1553- 1610) au Pape Paul V, ou encore une lettre de Charles IX (1550-1574).
 

 
[LUCE DE GAT ; HELIE DE BORON (ATTRIBUÉ À)]. [TRISTAN ET ISEULT (TRISTAN EN PROSE)].
 
Parmi les manuscrits, Tristan et Iseult, attribué à Luce DE GAT et Hélie DE BORON, est particulièrement remarquable (estimation : 250 000 – 350 000 €). Le roman a été écrit en français, probablement à Bruges vers 1470-1475, sur papier, et offert à un prince de la cour de Bourgogne (Simon ou Josse de Lalaing). Ce manuscrit est illustré d’un grand frontispice enluminé qui représente plusieurs scènes en un seul tableau. On reconnait Tristan qui monte à cheval. À gauche, Tristan accueille Iseult qui arrive en bateau. Enfin, dans une forêt lointaine, Iseult, assise au sol, assiste au combat de Tristan contre un sanglier sauvage. La miniature est attribuable à Loyset LIÉDET, artiste actif dès 1454, ou à son atelier. Il apparaît en 1469 parmi les nouveaux membres de la gilde des gens du livre de la ville de Bruges et travailla principalement pour la cour de Bourgogne, notamment le duc Charles le Téméraire pour qui il réalisa plus de 400 miniatures.

GRANDES HEURES DE GALEAZZO MARIA SFORZA LIVRE D’HEURES, À L’USAGE DE ROME

 
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Les Grandes Heures de Galeazzo Maria Sforza, en latin et en italien, enluminées sur parchemin à Milan vers 1471-1476 n’est pas moins exceptionnel (estimation : 600 000 – 800 000 €). Ce manuscrit fut copié et enluminé pour Galeazzo Maria Sforza. Né à Fermo (Marches) le 24 janvier 1444 et mort  à Milan le 26 décembre 1476, il fut d’abord comte de Pavie puis duc de Milan. Il était le fils de François Sforza (mort en 1466), allié de Cosme de Médicis et de Blanche Marie Visconti. Il se maria d’abord avec la fille de Louis III de Mantoue, Dorothée de Gonzague (1449-1467), qui décéda l’année suivante, le 24 avril 1467, à Pavie. Il se remaria, en 1468, avec Bonne de Savoie (1449-1485), fille de Louis Ier, duc de Savoie et d’Anne de Lusignan. Ayant assuré un gouvernement en demi-teinte, marqué par ses goûts artistiques et son caractère cruel, tyrannique et lubrique, Galeazzo fut assassiné le 26 décembre 1476 dans l’église Saint-Étienne (Santo Stefano) de Milan. 
Ce livre d’Heures est un monument à la gloire du duc de Milan : les emblêmes du prince ont une place presque égale à celle des sujets religieux dans les lettrines. D’une taille exceptionnelle, presque aussi grand que les Grandes Heures du Duc de Berry (chaque bi-folio nécessita une peau de chèvre entière), il pourrait s’agir d’un manuscrit utilisé sur un lutrin dans une chapelle princière. Les initiales historiées sont de la main d’un artiste milanais très subtil, baptisé Maître d’Ippolita Sforza, actif en Lombardie de 1450 à 1475. Son nom lui vient des manuscrits qu’il enlumine pour la soeur de Galeazzo Maria, Ippolita Sforza, notamment à l’occasion de son mariage avec Alfonso d’Aragon, duc de Calabre, en 1465.


HEURES PETAU, LIVRE D’HEURES À L’USAGE DE ROME

 
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Le chef-d’oeuvre de cette vente est le Livre d’Heures dit de Petau, estimé entre 700 000 et 900 000 €. Il se dit « de Petau » en référence à la famille Petau [Paul Petau (1568-1614) ou Alexandre Petau (1610-1672)], propriétaire identifié par les armoiries peintes, rajoutées au XVIIe siècle. Les Petau étaient de grands collectionneurs de livres et d’archives, qui avaient ouvert les portes de leur bibliothèque aux savants du XVIIe siècle. Certains, tels que Jacques Sirmond ou André Duchesne, firent éditer des textes qu’ils y trouvèrent. Les manuscrits de cette bibliothèque (appelés Petaviani) furent acquis entre 1590 et 1659 (pour ceux dont la date d’acquisition est connue). Alexandre Petau en possédait plus de 1 800 en 1650. Cette même année, il en vendit près de 1 500 à la reine Christine de Suède. La collection de la reine fut transmise à sa mort à la Bibliothèque du Vatican, où se trouve aujourd’hui une grande partie des anciens volumes des Petau. À la fin de sa vie, Alexandre Petau possédait une collection plus restreinte  d’environ 300 manuscrits et incunables, dispersés petit à petit. Au XVIIIe siècle, il semble que le Livre d’Heures de Petau ait appartenu à la famille Van Vooght à Bruges avant d’enrichir la collection du Baron James de Rothschild qui le fit relier à ses armes.

Décoré et écrit en latin sur parchemin, l’ouvrage témoigne d’une maîtrise extraordinaire de mise en page. Les 16 médaillons de camaïeu or sont l’oeuvre de Jean POYER (actif 1490-1520), artiste tourangeau qui comptait notamment Anne de Bretagne et ses deux époux royaux, Charles VIII et Louis XII, parmi ses commanditaires. La disposition de ces médaillons, représentant des scènes ou personnages bibliques, est exceptionnelle. Jean Poyer les a conçus par paires (recto-verso) au début et à la fin de chaque section des différentes divisions liturgiques. Les feuillets intercalés sont évidés en leur centre, permettant d’admirer les camaïeux d’or tout en lisant le texte en rapport.

 
 
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SAINT JERÔME, EPISTOLAE [LETTRES], ÉDITION ÉTABLIE PAR ADRIANUS BRIELIS (MORT EN 1472)
MAYENCE : PETER SCHOEFFER, 7 SEPTEMBRE 1470



Les incunables incluent la première édition, enluminée, des Lettres et Traités de saint Jérôme (estimation : 600 000 – 800 000 €). Ces documents ont été imprimés et commentés dès les premières décennies de l’imprimerie : quatre éditions des Lettres de saint Jérôme entre 1468 et 1470 sont connues, contenant entre 70 et 130 lettres. L’édition présentée dans cette vente, renouvelée par Peter SCHOEFFER contient plus de 200 épîtres, organisées thématiquement. Schoeffer fit en effet l’effort de rechercher des lettres inédites dans les bibliothèques ecclésiastiques et monastiques. L’ouvrage est doté d’un décor peint à la main, typique de l’enluminure pratiquée à Mayence (Allemagne). Plus précisément, les artistes ayant oeuvré pour ces volumes sont directement reliés à l’officine de Peter Schoeffer à Mayence. Le décor s’ouvre par une initiale historiée de 16 lignes de hauteur, faisant office de « page-frontispice », figurant saint Jérôme dans son studiolo ; l’initiale est prolongée par une bordure décorée avec des archers chassant un dragon. À ce décor se rajoutent plusieurs initiales peintes et ornées, d’une hauteur de huit lignes, introduisant chacune des Distinctions. Lorsque Peter Schoeffer a conçu son édition, il a proposé des versions sur papier ou sur vélin, décorées ou non, avec des ornements allant du simple filigrane à l’enluminure historiée. Cet exemplaire, sur vélin, dit « Doheny », est à classer parmi les ouvrages de luxe sortis de l’officine de Schoeffer.
 

MONTAIGNE (MICHEL DE), Essais de Messire Seigneur de Montaigne

 
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Enfin, l’édition originale des deux premiers livres des Essais de Michel de MONTAIGNE (1533-1592) figure parmi les imprimés (estimation : 100 000 – 150 000 €). Montaigne et l’éditeur, Simon Millanges, ont partagé les coûts de la publication. Ainsi, les exemplaires revenant à l’éditeur furent mis en vente, tandis que ceux réservés à l’auteur furent distribués à des familiers. Montaigne fit paraître une seconde édition de son ouvrage en 1582. Enrichie de plusieurs citations, celle-ci tenait compte aussi de la censure romaine et comportait au début du chapitre Des prières une mise au point acceptant par avance la condamnation par l’Église.




JANSSONIUS (JOHANNES), Nouvel Atlas ou Théâtre du Monde comprenant les tables et descriptions de toutes les régions du monde universel.
 

Clôturant la vente, six volumes du Nouvel Atlas ou Théâtre du Monde comprenant les tables et descriptions de toutes les régions du monde universel, conçu par JANSSONIUS (JOHANNES) (1588-1664) permet de voyager à travers des cartes datées de 1652, 1656 et 1657 (estimation : 100 000 – 150 000 €). Il s’agit d’un des fleurons du siècle d’or de la cartographie des Pays-Bas, complet, dans sa reliure en vélin doré de l’éditeur, ayant possiblement appartenu à Montesquieu. Le « Nouvel Atlas » est l’oeuvre de plusieurs générations de cartographes qui ont pour noms Mercator, Ortelius et Jodocus Hondius.
 
 
Cette vente, n° 2, est organisée par Aguttes
Nombre total de lots : 45
Estimation totale : 4 500 000 €

Vente aux enchères publique – Drouot – Salle 9
Samedi 16 juin 2018 – 14h30

Exposition publique – Drouot – Salle 9
Mardi 12 juin – 11h – 18h
Mercredi 13 juin – 11h – 18h
Jeudi 14 juin - 11h – 21h
Vendredi 15 juin – 11h – 18h
Samedi 16 juin - 11h - 12h
 



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Aguttes

Écrits du Moyen-Âge et de la Renaissance

Vente : samedi 16 juin 2018
Salle 9 - Hôtel Drouot - 9, rue Drouot 75009 Paris, France
Maison de vente
Aguttes
Les Collections Aristophil
Tél. 01.47.45.55.55