OVA - LES COLLECTIONS ARISTOPHIL - Vente n°12 - BEAUX-ARTS

vendredi 16 novembre 2018

Expert : Claude Oterelo

Sous le thème des Beaux-Arts, cette vente formidable aborde les arts vivants : le théâtre, la chanson et le cinéma. On y retrouve des manuscrits, des épreuves corrigées ou des écrits en lien avec les auteurs qui ont marqué l’histoire moderne du théâtre avec leurs pièces mémorables : Victor Hugo, Raymond Queneau, Marcel Pagnol, Sacha Guitry, Jean Cocteau… Le 9e art est représenté de façon importante. De Jacques Prévert, figure le manuscrit du mythique Quai des Brumes, qui sera adapté au cinéma par Jean Carné en 1939, et du « Maître du Suspens », Alfred Hitchcock, c’est le storyboard du film Le grand alibi tourné en 1951 qui est présenté. Entre « poésie pure » et « art mineur » comme le soutenait Serge Gainsbourg, la chanson est évoquée également avec les manuscrits de travail de monuments tels que Le Port d’Amsterdam par Jacques Brel ou Les feuilles mortes de Prévert, dont les paroles sont immortalisées par la voix d’Yves Montand en 1949.
 
Le manuscrit de l’un des films les plus célèbres du cinéma français est sans conteste le lot phare de cette vacation. Il s’agit du mythique Quai des Brumes, dont ce premier jet de scénario fut rédigé en 1937 par Jacques PRÉVERT (1900-1977) (estimation : 100 000 - 150 000 €). Après Drôle de drame, Jacques Prévert et Marcel Carné décident d’adapter pour leur prochain film le roman de Pierre Mac Orlan Le Quai des brumes (1927). Prévert transporte l’action de Montmartre au Havre où le tournage commence le 2 janvier 1938 pour les extérieurs puis se poursuit aux studios de Joinville dans les décors d’Alexandre Trauner, avec dans les rôles principaux Jean Gabin, Michèle Morgan, Michel Simon, Pierre Brasseur. Le film sort le 17 mai 1938 et remporte aussitôt un immense succès. Le manuscrit présenté ici contient de nombreuses corrections, ratures, suppressions, etc. Il a été très remanié sur dactylographie lors du découpage et de l’écriture des dialogues. La scène qui se déroule sur les docks où Jean (Jean Gabin) dit cette fameuse phrase « Tu as de beaux yeux » à Nelly (Michèle Morgan) est bien plus étoffée dans le manuscrit que dans le film.
 
aaa
 

 
Le storyboard de Stage Fright (Le Grand Alibi), d’Alfred HITCHCOCK (1899-1980) est composé de 130 feuillets noircis en 1949 (estimation : 50 000 - 60 000 €). L’ensemble des feuillets comprend 340 dessins à la mine de plomb, correspondant aux plans du film. Ce découpage dessiné est une parfaite illustration de la méthode d’Alfred Hitchcock : chaque scène est précisément écrite, le film est entièrement dessiné plan par plan selon l’angle de vue décidé de sorte que les storyboards d’Hitchcock sont une préfiguration exacte de ce qui va apparaître à l’écran. On prétend que sur un plateau, il ne regardait jamais lui-même à travers le viseur de la caméra, tant il savait exactement ce qui allait apparaître à l’écran.

Le film fut tourné à Londres en 1950 dans une atmosphère très britannique, avec Marlène Dietrich dans le rôle principal. Jonathan Cooper (interprété par Richard Todd) est amoureux d’une actrice. Soupçonné d’avoir assassiné sa femme, il convainc son amie Eve (Jane Wyman) de l’aider à prouver son innocence. Il s’agit là de l’un des thèmes fondamentaux d’Alfred Hitchcock, celui de l’innocent injustement persécuté.
 
Kafka et Welles sont deux artistes que tout rapproche. Malgré le dédain qu’exprime Kafka pour le cinéma, la théâtralité de Kafka attire Welles, homme de théâtre. Les 95 feuillets, dont 91 comportant des dessins originaux d’Orson WELLES (1915-1985) pour Le Procès, placent le décor des lieux inquiétants dans lesquels débattront K. (Anthony Perkins), son avocat (Orson Welles) et Leni (Romy Schneider). Plus que de l’œuvre de Kafka, c’est de ses préoccupations personnelles dont s’occupe Orson Welles lorsqu’il décide de tourner Le Procès : « Dorénavant je m’intéresse plus aux abus de la police et de l’état qu’à ceux de l’argent parce qu’aujourd’hui l’état est plus puissant que l’argent. Je cherche donc quelque moyen de dire ça ». Œuvre d’auteur par excellence, Le Procès permit à Welles de créer des décors futuristes aménageant l‘espace pour filmer comme il l’entend.
 

 
Dans En avant la zizique par ici les gros sous, Boris VIAN (1920-1959) détaille, dans un style décapant et plein d’humour, les étapes successives de la création d’une chanson. Le manuscrit autographe et tapuscrit de 1958 dénonce les abus, déviances, pressions diverses et indique les recettes pour réussir dans ce domaine. Chapitre après chapitre, tous les acteurs sont passés au crible – interprètes, accompagnateurs à tout faire, musiciens, public, critiques –, l’éditeur qui « s’estime qualifié pour juger le travail d’un organe producteur, le cerveau. Il devra d’abord démontrer qu’il possède un cerveau ». Boris Vian milite pour la bonne, la vraie chanson (estimation : 30 000 - 40 000 €).
Le cahier autographe de Jacques BREL (1929-1978) contient, entre autres, la célèbre chanson Amsterdam (estimation : 40 000 - 50 000 €). Lorsque Brel compose Amsterdam, il imagine une chanson de marin ressemblant à un tableau de Brueghel, avec une note classique d’accordéon en sourdine.
Dans son cahier, Brel commence par écrire ce couplet : « Dans le port d’Amsterdam / ya des marins qui boivent / qui boivent et qui reboivent / à [la santé des dames] et qui boivent encore ». Il n’avait l’intention que d’en écrire deux, mais ce sont finalement quatre couplets qui se succèdent dans la version définitive. La chanson fut interprétée pour la première fois sur scène en 1964. Brel aimait faire découvrir ses chansons à son public quelques jours après les avoir achevées. Chantée en ouverture à Versailles, le public ne l’accueillit pas avec enthousiasme, Brel préfèrera la chanter en troisième position à l’Olympia. Dès le premier couplet, le public est interloqué puis au terme de l’interprétation, le succès est total.
 

 
En 1967, Serge GAINSBOURG (1928-1991) entretient une relation sentimentale avec Brigitte Bardot qui lui demande de composer la plus belle chanson d’amour jamais écrite. En une nuit, l’artiste composera Je t’aime moi non plus et Bonny and Clyde. Enregistrée en 1967, la première diffusion radio de la chanson provoque la colère de Gunter Sachs, homme d’affaire allemand et mari de Brigitte Bardot. La diffusion radio fut immédiatement arrêtée.
En 1968, Gainsbourg et Jane Birkin tombent amoureux lors du tournage du film Slogan de Pierre Grimblat. Jane Birkin ne veut pas réinterpréter cette chanson si emblématique d’un amour défunt, mais voyant de nombreuses chanteuses et actrices pressant Gainsbourg de la chanter avec elle, elle accepte. Ils la réenregistrent à Londres en incluant le titre dans l’album Jane Birkin-Serge Gainsbourg sorti en 1969.
L’accueil par le public fut excellent, celui des médias et des autorités culturelles beaucoup plus mesuré. L’Express qualifie la chanson de « duo en râle mineur » et les radios françaises boycottent le titre. La BBC, malgré le fait que pour la première fois une chanson française soit en tête du Hit Parade, ne diffuse que la version instrumentale sous le titre Love at first sight par le groupe (imaginaire) « Sounds Nice », l’Osservatore Romano qualifie la chanson « d’obscène », ce qui entraîne l’arrêt de la diffusion en Italie puis en Espagne, au Portugal, au Brésil, en Suède et aux Pays-Bas : il s’agit du succès le plus retentissant de Gainsbourg. L’album Jane Birkin-Serge Gainsbourg, est considéré comme le premier disque « provoc » de Gainsbourg. Il composera également « 69 année érotique » et ne quittera plus son costume de provocateur. Le manuscrit de cette chanson mythique est estimé 15 000 - 20 000 €.
 

Cette vente, n° 12, est organisée par Drouot Estimations
Nombre total de lots : 93
Estimation totale : 850 000 €

Vente aux enchères publiques – Drouot – Salle 1
Vendredi 16 novembre 2018 – 14h

Expositions publiques – Drouot – Salle 1/7
Lundi 12 novembre – 11h / 18h
Mardi 13 novembre – 11h / 18h
Vendredi 16 novembre 2018 – 11h / 12h

Consultation sur rendez-vous à l’étude


Partager sur

ARTS VIVANTS - ARTS DU SPECTACLE PAR DROUOT ESTIMATIONS

Vente : vendredi 16 novembre 2018
Calendrier Paris 75000 Paris, France
Maison de vente
Les Collections Aristophil
Tél. +33 (0)1 47 45 93 06